Un silence radio de plus de deux mois, je sais c’est long. Faut dire que j’avais un peu la tête dans le guidon. Au sens propre. Les six semaines de formation sont passées vite, très vite, voire trop vite. Attention, pavé à venir.
Cette formation a très bien commencé, nous étions une quinzaine répartis en deux groupes. Quand le premier groupe était en salle pour apprendre les fiches « mécanique/sécurité routière », l’autre faisait de la pratique personnelle. L’ambiance était beaucoup plus détendue et agréable qu’en formation auto puisqu’avant la fin de la première semaine, un barbecue était déjà organisé au centre de formation. Et ce qui est bien ce que cette ambiance ne s’est jamais dégradée. Chacun était là par passion avec une réelle envie de réussir, là où en tronc commun(formation auto), on pouvait sentir que certains se retrouvaient là un peu par hasard ou par obligation. Même si j’étais le seul à payer intégralement ma formation, la plupart de mes collègues avait aussi participé au moins en partie aux 3200€ réclamés pour suivre le programme de six semaines. Que des gens motivés en somme, avec des profils aussi différents que des personnes n’ayant jamais enseigné, tout juste sortie du diplôme de base, en passant par certains qui venait juste d’obtenir le permis moto jusqu’au quinca qui se décide à passer sa mention en prévision du futur départ de son moniteur principal. Des passionnés de sportive, de Harley, de basique à pas chère, de vieux tromblon, de moto cross, de piste et de balade dominicale.
Question environnement c’était un peu le rêve. la piste d’entrainement située au milieu d’un zone industrielle perdue en campagne, cernée par des champs de maïs, avait moins d’un an. Les motos fournies pour nous entraîner et pour l’examen étaient des Yamaha MT-07 toutes neuves, avec moins de dix kilomètres au compteur. Comparé à ma CB500 vieille de presque 20 ans, j’ai eu l’impression de rouler sur un vélo dopé aux hormones. Super maniables, légères, compteur digital et ABS mais aussi très plastique et un peu fade au bruit, c’était LES outils pour réaliser ce qu’on attendait de nous.
Je ne vais pas mentir, j’ai galèré. Les parcours rapides, à force de prendre confiance (parfois trop) ont vu leurs chronos diminuer à petit feu sans trop de soucis, le temps d’apprivoiser les limites de la bécane et de réapprendre les techniques de base pour rouler propre et donc rapide. Au début, on ose à peine pencher de peur de perdre l’adhérence et rapidement, ce sont les tampons de protection qui limitent l’angle que vous prenez. Et ce même sous la pluie, qui a hanté nos journée de pratique en s’abattant sur nous comme la misère sur le monde(j’ai maintenant un équipement pluie complet et efficace d’ailleurs).
Les tampons entre le début et la fin de la formation
En revanche pour les parcours lents ça a été l’horreur. Techniquement difficile à appréhender, au niveau du gabarit c’était pas simple non plus, étant l’un des plus léger, maîtriser le poids de la moto à allure extra lente avec un passager faisant entre 20 et 50Kg de plus que moi me semblait impossible. Les commandes d’embrayage trop sensibles à mon goût et trop loin pour mes petites mains ne m’aidaient pas non plus. J’ai lutté pendant quatre semaines sans maîtriser vraiment le bousin. Les choses ce sont débloquées avec le changement des commandes par des commandes réglables et un déblocage plus ou moins psychologique. À la fin, je passais tous les lents avec 80% de réussite à peu près.
Le niveau était très variable aussi et j’avoue que voir certains collègues s’amuser à descendre sous les chronos des rapides de plusieurs secondes ou passer les lents le plus lentement possible en tenant la moto à la limite de l’arrêt était assez énervant voir déprimant par moment.
Quand la formation a touché à sa fin j’avais le sentiment que j’allais foirer. Une réminiscence de ma mésaventure du tronc commun couplée avec mon manque de confiance dans le format de l’examen (le stress, le côté « pièce de théâtre », la rapidité avec laquelle tout peut tomber à l’eau). Il y a eu aussi quelques évènements qui me disaient que j’étais dans un mauvais karma alors que ce genre d’idée me fait habituellement sourire. Je me suis par exemple fait définitivement confisquer mon couteau de poche fétiche lors d’un contrôle de police à Gand.
Puis j’ai eu mon premier « accident » avec la voiture de l’auto-école lors de la semaine de boulot qui précédait l’examen. Sans gravité, en marche arrière à moins de 10km/h mais tout ça mit bout à bout me donnait un feeling vraiment mauvais pour ce qui m’attendait.
Le jour J, j’étais vert de peur et je me trimbalais le pire mal au ventre de la création. Arrivé à 7h30 sur place, j’étais le premier à ouvrir le bal des examens, mais pas avant 8h30. Et à partir de là c’était presque parfait.
J’ai commencé par tirer ma fiche orale et ai donc présenté aux inspecteurs toutes les particularités mécaniques des side-cars avant de leur expliquer en détail les dangers des modifications sur les cyclomoteurs. Ces même inspecteurs bien moins guindés que ce à quoi je pouvais m’attendre puisqu’en voyant ma tronche l’un d’eux ma gentiment lâché: « Détendez vous monsieur, on est entre passionnés ». J’avais 15 minutes à tenir et j’ai tout donné en 11 minutes, certain d’avoir oublié des points essentiels.
Ensuite c’est l’épreuve de maniabilité. Bouger la moto à l’arrêt ça va, je récupère mes 2/20 puis j’ai 8 points à prendre sur le lent. Et là c’est le drame, je ne retrouve plus mes repères, mon estomac tente un triple loots et je parviens à faire deux tout droit dans le parcours. Je suis donc toujours à 2/20. Je m’effondre un peu moralement. Il me reste 10 points à prendre sur le rapide pour espérer limiter la casse et prendre un 12/20. La piste est quasiment sèche, trois goûtes d’eau se battent au sol mais la piste est déclarée humide. Ce qui signifie que tout les chronos demandés sont allongés de deux secondes. Ma peur à ce moment et d’être trop rapide et donc de prendre 0/10. Je fais mon parcours rapide en demi teinte, complètement paumé entre mon envie de rester dans les temps sans être trop lent non plus. J’arrête la moto dans les repères et les inspecteurs me tournent le dos pour faire la moyenne de leur chronométrage. Le temps semble s’arrêter et j’attends le jugement divin sur au moins un siècle avant que l’un des deux se retourne et me dise « c’est bon monsieur, vous passer à l’épreuve de pédagogie ».
Dépressurisation complète de l’habitacle, je respire. J’ai sauvé les meubles.
Reste plus que l’épreuve avec un vrai élève, je peux tomber sur plateau ou circulation et je prie secrètement pour le plateau, tellement plus sécurisant. Moi et un autre candidat devons choisir à pile ou face pour savoir qui reste pour le plateau et qui part en circulation. Je décide de prendre la pièce et je lance: j’ai mon sésame pour le plateau.
L’élève est une élève. Souriante, volontaire et en plus je la connais un peu. Je trouve son défaut assez rapidement et le cours me semble bien se passer. Au bout d’une heure c’est terminé. Même si un gros soulagement s’en suit, je sais que je ne serais détendu que lorsque les résultats tomberont, dix jours plus tard.
Ce qui m’amène à vendredi dernier, journée pendant laquelle je guette mon portable toute la matinée. Vers midi et demi un candidat libre que je connaissais bien m’appelle avant mon centre de formation. Il y’a mon nom sur le site de la préfecture à la rubrique « Reçus Mention Deux Roues 2015 »
Au final j’ai eu mon 12/20 en pratique perso comme prévu, 18/20 aux fiches et 18/20 en pédagogie. Je suis un peu déçu d’être passé à côté du 20/20 en pratique perso pour une question de nerfs mais pour être honnête je m’en fous un peu. J’ai mon diplôme et quand l’envie m’en prendra, je pourrai trouver une auto-école faisant moto. Au moins ça c’est fait. Reste à rembourser le crédit. Et respirer. Ce qui est sûr, c’est que j’en garderai un très bon souvenir.
Prochain projet, passer le permis remorque mais ça peut attendre un an ou deux 😀
PS: Pour l’anecdote, le major de promo est une femme, la seule de notre formation :p
Pouaaaaahhhh quel stress!
J’ai dû agripper ma main pour ne pas aller jusqu’en bas de l’article immédiatement pour savoir si tu avais réussi ou non, même si je crois qu’au fond de moi je savais déjà quelle serait la finalité de tout ça…
Bravo fieu! Je sais à quel point c’était important pour toi! Je repensais l’autre jour à ton article d’il y a quelques années sur la déception de ton échec et sur mes conseils maladroits d’abandonner l’affaire… Je suis tellement contente de voir que tu as persisté et que cela a payé au final,j’espère que tu seras épanoui dans ton boulot, parce que tu le mérites!