L’Obscurité. Totale et non négociable. Impalpable. Pas de profondeur. Pas de sensations non plus. Rien que le vide de l’inconnu. Les mains jetées devant le corps cherchent dans le noir à apprivoiser une forme, à toucher quelque chose. Le temps s’écoule sans pouvoir le mesurer. On ignore depuis combien de temps on est là, depuis combien de temps on tâtonne sans succès. Alors on s’assoie en tailleur, la respiration se fait plus calme et les battements de notre cœur cessent de tambouriner les veines de notre corps. Le silence s’installe en nous et se fait rassurant. Des crépitements surgissent dans notre dos. Et on les voit soudain. Des étincelles. Comme des bougies magiques d’anniversaire. Comme si des centaines de briquets sans gaz s’évertuaient à vouloir survivre après leur mort. Les poussières de flamme se font nuage. Elles n’éclairent rien autour. le vide est trop profond, trop épais. Mais la lueur s’étend. On reste sidéré devant le spectacle. Nos yeux sont grands ouverts malgré le choc lumineux. Ces brindilles brulantes s’agglomèrent entre elles en une sphère de feu. Parfaite. Elle rougeoie et tourne sur elle même. Elle semble rouler vers nous mais ne bouge pourtant pas. Si l’on tendait le bras on pourrait l’effleurer mais on n’ose pas, de peur que tout s’arrête. La rotation s’accélère encore et encore. Le souffle du feu empli l’espace, la lueur s’intensifie au même rythme. Le spectacle se fait inquiétant. La sphère est instable. Trop pour rester en place. Nous sommes paralysés. Et sans que nous puissions l’éviter, sans que nous voulions l’éviter, elle se jette sur nous. En plein cœur.
Terrassé, étendu au sol, nous sommes toujours vivant. La lueur s’est éteinte autour. L’Obscurité a repris ses droits. Le choc était à la fois doux et violent. Les étincelles n’ont pas disparu. Elles ont simplement trouvé refuge en nous. Des paillettes de napalm circulent désormais dans notre sang. Nous n’aurons plus jamais froid…

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