Je lui ai expliquée que c’était fini comme on explique à un enfant que le père noël n’existe pas. Par étape, doucement, sans mentir, le plus simplement possible mais avec une culpabilité difficile à dissimuler. Mots après mots, raisons après raisons, elle m’écoutait mettre en pièce sa vie. Son visage se figeait au fur et à mesure qu’elle comprenait sans me quitter des yeux. Je me suis arrêté de parler arrivé au bout de mon réquisitoire. Elle ne dit rien pendant quelques secondes qui semblèrent durer une vie. Enfin, elle s’est effondrée. Son menton est tombé comme un marteau contre son torse, ses mains sont venues enfermer son visage et le son de ses sanglots se ruait sur moi. J’attendais cette réaction, pire, je l’espérais j’avais bien sûr tout imaginer depuis des jours et la moindre fausse note dans ma vision des choses aurait été insupportable. Les larmes perlaient et goutaient dans les manches de son pull. Je contemplais le spectacle, mon œuvre, ma terrible œuvre, attendant que les sanglots cessent. Quand ce fut le cas elle releva la tête et me fixa avec des yeux plus rouge que vert. Elle semblait attendre que je dise quelque chose. J’en avais déjà suffisamment fait d’après moi. Sans savoir pourquoi j’ai repensé à la tête de Demi Moore à la fin de Ghost quand elle chiale comme une madeleine. Ça me donnait envie de lui mettre une baffe. D’un seul coup je n’avais plus envie de parler. Je voulais penser et faire autre chose. J’ai pris ma veste et je sorti. Quand je suis rentré, beaucoup plus tard, elle n’était plus là et une bonne partie de ses vêtements également. Dans la semaine qui suivit, elle s’est arrangée pour tout faire disparaitre pendant que je n’étais pas là. Avec le recul je crois que je n’ai jamais été aussi franc avec quelqu’un. Par la suite j’ai changé de ville. Je ne l’ai jamais revue.
Il est fort ce texte. Simple mais intense.